En décalage
Objectif emploi. Stimuler la croissance grâce à une politique budgétaire qualifiée de « proactive », tel est le message retenu par la plupart des commentateurs des sessions annuelles du National People’s Congress (NPC, Assemblée nationale populaire) et du CPPCC (Chinese People’s Political Consultative Conference, Conférence consultative politique du peuple chinois), qui se sont tenues du 5 au 16 mars 2016. Loin d’être inexacte, cette interprétation ne cite cependant pas expressément l’objectif majeur des autorités chinoises, à savoir de garantir la paix sociale et par conséquent de générer un taux d’emploi le permettant. Ce n’est guère un hasard si le « maintien d’un taux de chômage autour de 4,5 % en zone urbaine » et la « création d’au moins 10 millions d’emplois en zone urbaine cette année » sont des objectifs classés dans le haut du tableau des neuf cibles à atteindre, fixées par le gouvernement chinois pour 2016.
Cette bataille est d’autant plus délicate qu’elle n’est pas gagnée d’avance : Les autorités de l’Empire du Milieu doivent s’assurer de l’adéquation du marché du travail à la nouvelle structure économique du pays. A plusieurs vitesses suivant les régions et les villes, celle-ci se caractérise à la fois par une industrie traditionnelle manufacturière sinistrée, et par un secteur des services en pleine expansion, à la pointe de la modernité. Le secteur tertiaire vient d’ailleurs tout juste de dépasser les 50,5 % du PIB chinois.
Par ailleurs, à en croire la dernière étude de China Beige Book International (basée aux États-Unis, présidée par Leland Miller) réalisée auprès de 2 200 sociétés et 160 banques, « seulement » 23 % des entreprises chinoises interrogées auraient augmenté le nombre de leurs collaborateurs au premier trimestre 2016. Elles auraient préféré accroître leurs bénéfices au détriment de la création d’emplois, tout en ralentissant la croissance de leurs dépenses en capitaux.
Parmi les multiples pistes destinées à stimuler le secteur privé, les autorités chinoises promettent une réduction notable des coûts des entreprises grâce, notamment, à une réforme profonde du système fiscal. Selon le ministre des Finances, Lou Jiwei, les initiatives ainsi engagées devraient provoquer (pour les entreprises et pour les individus) une économie globale d’impôt de 500 milliards de yuan (76,9 milliards de dollars) cette année.
Dans cette optique, la taxe sur la valeur ajoutée (« Value Added Tax », VAT) devra remplacer, dans tous les secteurs, la taxe professionnelle (« business tax »), qui était jusqu’à présent imposée sur la valeur des ventes des sociétés. C’est ainsi que, dès le premier mai, une VAT de 11 % sera prélevée sur les entreprises de la construction et de l’immobilier tandis qu’une VAT de 6 % sera appliquée sur celles de la finance et des services à la consommation. Même si cet alignement global sur les pratiques internationales était attendu de longue date (approuvé dans le concept par le NPC de 2008), son application accélérée a toutes les chances de monopoliser l’attention des directions financières et comptables des grandes maisons chinoises au cours des prochaines semaines.
Données au long cours
Chine, les outils et les moyens d’une politique budgétaire « proactive » en 2016
Le recours au fonds de stabilisation
Source : MoF, HSBC, CEIC, AXA-IM Research
L’utilisation du fonds de stabilisation explique la différence entre les déficits budgétaires planifiés et réalisés. Ce recours a permis au gouvernement chinois de dépasser son budget d’environ 735 milliards de Renminbi en 2015. Ce procédè tranche avec l’ancienne habitude des autorités, qui était plutôt de contribuer au fonds de stabilisation en y apportant la part budgétaire projetée mais non dépensée en fin d’année. Selon les estimations d’AXA IM, l’accumulation d’épargne dans le fonds de stabilisation (liée à la « sous-exécution » budgétaire des autorités chinoises) se serait établie à 1 300 milliards de Renminbi fin 2014. De fait, à la suite de son « drainage » en 2015, le fonds de stabilisation disposerait encore de près de 570 milliards de Renminbi d’épargne accumulée.
D’importants acomptes fiscaux
Source : MoF, HSBC, CEIC, AXA-IM Research
Une autre manne sont les acomptes fiscaux de l’État et des agences gouvernementales, qui, bien sûr, ne doivent pas se destiner à des dépenses de court terme. Cependant, une partie de ces dépôts peuvent permettre d’équilibrer les livres du gouvernement. A l’heure actuelle, le solde des dépôts fiscaux du gouvernement central s’élève à 3 800 milliards de Renminbi, tandis que celui des agences gouvernementales s’établit à 21 000 milliards de Renminbi.
Les opérations en capital de l’État, une source d’épargne non négligeable
Revenus, dépenses et épargne accumulée provenant des opérations en capital de l’État chinois
Source : MoF, CEIC, AXA-IM Research
Pour 2016, une troisième source de revenus supplémentaires proviendra de l’augmentation de l’allocation au budget public général (de 16 % en 2015 à 19 % cette année) des fonds provenant des opérations en capital de l’État (Voir graphique ci-dessus). En outre, 68 entreprises (dont China Railway Corporation) seront incorporées à ce budget. La mobilisation de ces fonds se dédiera spécifiquement à la restructuration prévue des SOE (entreprises détenues par l’État).
Retour aux sources
Hong Kong / Hong Kong Exchanges and Clearing Limited (HKEX)
Bilan 2015 – « Fact book » 2015
http://www.hkex.com.hk/eng/stat/statrpt/factbook/factbook2015/fb2015.htm
Hong Kong / Hong Kong Trade Development Council’s (HKTDC) Research Department
Indice trimestriel des exportations
http://research.hktdc.com/
Chine /National Bureau of Statistics of China (BNS)
Statistiques et bilan économique de 2015
http://www.stats.gov.cn/english/PressRelease/201602/t20160229_1324019.html
Japon / Bank of Japan (BOJ)
Évolution des portefeuilles des ménages japonais dans un contexte de stagnation
https://www.boj.or.jp/en/research/wps_rev/wps_2016/wp16e04.htm/
Invitation au voyage
Vue sur Plover Cove, Nouveaux Territoires, Hong Kong
Changer d’horizon
A découvrir, « Kyoto en Kimono d’automne »
(http://www.lazuli-international.com/kyoto-en-kimono/)