En direct de l’Asian Financial Forum, un nouveau paradigme pour la croissance
L’Asian Financial Forum (AFF), organisé par le Hong Kong Trade Development Council (HKTDC), qui se tient les 18 et 19 janvier à Hong Kong, attire les foules cette année. Et pour cause, l’objectif principal des multiples conférences à l’ordre du jour est de débattre des initiatives menant à la création d’un nouveau paradigme pour la croissance mondiale et asiatique.
La séance d’ouverture du forum a été l’occasion de rappeler le rôle majeur de Hong Kong dans la diffusion de l’activité chinoise hors de ses frontières et vice et versa. « Le forum a lieu entre la nouvelle année occidentale et la nouvelle année chinoise, à l’image du positionnement de Hong Kong, » commente C Y Leung, le Chef de l’exécutif de Hong Kong.
Bénéficiant du fonctionnement « un pays deux systèmes, » la région administrative spéciale de la République Populaire de Chine contribue à la concrétisation des ambitions de la Chine continentale tout en promouvant les coopérations internationales et les réseaux commerciaux. Grâce à sa « société ouverte, le Port au parfum accueille les opérations d’affaires locales et étrangères, joue son rôle de « super-connecteur ». Cet élément est fondamental dans la mise en œuvre de l’initiative chinoise « One Belt, One Road » (« Une Ceinture, une Route » / OBOR), dont Hong Kong doit savoir capter la richesse, » insiste C Y Leung.
La présence d’un autre invité de marque, Arkady Dvorkovich, vice-Premier ministre de la Fédération de Russie, destinée à souligner aussi l’importance de la concrétisation de l’OBOR, n’a, en tout cas, guère échappée aux experts en géopolitique : Certains d’entre eux estiment en effet que l’un des obstacles à la construction de la Route de la soie du 21ième siècle (selon le tracé envisagé par Pékin) est l’alignement d’intérêts entre la Russie et la Chine, en particulier dans certaines zones d’influence traditionnellement russes.
L’AIIB, vecteur de stabilité
Pour l’heure, cette thèse semble contredite par l’implication de la Russie dans l’Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB), dont elle est le troisième plus grand actionnaire, après la Chine et l’Inde. Officiellement ouverte le 16 janvier 2016, présidée par Jin Liqun, l’AIIB devrait prêter 10 milliards de dollars par an au cours des cinq à six premières années de son existence. A ce propos, Arkady Dvorkovich a précisé que le premier prêt devrait être approuvé dans les six mois à venir, souhaitant « que la banque contribue aux projets d’infrastructure de la route maritime appelée « arctique » ou « du Nord ». Il peut s’agir de voies ferroviaires afin de transporter les cargaisons vers les ports le long de la route maritime. »
En force grâce à plusieurs membres fondateurs (dont le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Suède, la Finlande, l’Autriche, ou les Pays-Bas), l’Europe espère également bénéficier de ce nouveau mécanisme de financement. Son rôle de stimulateur d’investissements n’est pas le seul élément apprécié. « L’AIIB est une initiative favorable à la paix. Lorsque les économies liées à la Route de la soie seront plus imbriquées, nous gagnerons en stabilité, » espère Pierre Gramegna, ministre des finances du Luxembourg.
L’autre aspect jugé éminemment positif est l’ambition de la nouvelle banque d’être une « institution propre, « maigre » et verte, » comme s’y engage son président. La « croissance du futur viendra de plus en plus de la qualité et non plus de la quantité, » juge à ce titre Pierre Gramegna.
Remarquant que le modèle de croissance mondial actuel, extrêmement polluant, « n’est plus tenable, ni pour notre santé ni pour notre développement, » Per Bolund, ministre des Marchés financiers et de la Consommation en Suède, invite, quant à lui, à se pencher sur le modèle de son propre pays. Il rappelle que la Suède a « obtenu le taux d’activité le plus élevé des économies d’Europe tout en réduisant fortement ses émissions de carbone. » Financer une croissance verte tout en contribuant aux développements des échanges entre les nations situées le long de la Route de la soie du 21ième siècle, tel est le défi ambitieux à relever par l’AIIB.
Écouter les consommateurs
L’autre pilier du « nouveau paradigme pour la croissance », discuté lors de l’AFF, est la prise en compte, via les technologies, des nouvelles habitudes des consommateurs, fondatrices « de l’économie de partage, en train de progresser » indique Per Bolund.
Ce mouvement pourrait même être accompagné de nouvelles politiques publiques. A cet égard, grand observateur du marché de la consommation chinoise et de son potentiel, le président du gigantesque Dalian Wanda Group, Wang Jianlin, estime que l’objectif de la Chine aujourd’hui – et qu’elle a des chances de réaliser – est de diminuer son ratio investissements sur PIB tout en accroissant la part de sa demande domestique. Il expose : « Beaucoup de ménages chinois dépensent à l’étranger mais ils pourraient tout aussi bien le faire en Chine. » Dès lors, « comment stimuler la consommation intérieure ? C’est une question que je pose… En donnant confiance aux biens produits localement, en produisant plus en Chine ce qui correspond à la demande du peuple chinois, » suggère-t-il.
A propos des inquiétudes émises par des auditeurs de l’AFF concernant le marché immobilier chinois, Wang Jianlin assure : « Je ne crois pas qu’il va s’effondrer. Il faut considérer l’offre et la demande des différentes régions chinoises. Je ne vois, par exemple, aucun problème à Pékin, ni à Shanghai ou à Shenzhen. Dans certaines villes, l’offre manque. Parfois, il n’y a même aucun centre commercial ni cinéma… » Mesurer la santé de l’immobilier chinois est un exercice complexe. Il faut savoir en analyser toutes les diversités régionales. Et d’ajouter : « On ne peut pas comprendre la Chine si l’on reste aux États-Unis ou en Europe. » Une véritable invitation au voyage.
(Repris par www.lepetitjournal.com/hong-kong ; Le Petit Journal de Hong Kong )