La Chine gratifie les États-Unis d’un premier et gigantesque quota « RQFII »
Coup de théâtre. La Chine vient d’attribuer aux États-Unis leur premier quota dans le cadre du programme « Renminbi Qualified Foreign Institutional Investor » (RQFII) instauré depuis décembre 2011, auquel participent déjà 16 pays. De plus, le quota accordé est considérable. Il est de 250 milliards de Renminbi (38 milliards de dollars environ), tout juste inférieur à celui de Hong Kong (270 milliards de dollars) et représente plus du double de celui de la Corée du Sud (120 milliards de Renminbi). Exclus du système pendant cinq ans, les États-Unis se hissent soudain à la deuxième place du classement des pays bénéficiaires d’un RQFII ( Voir tableau ). Cette initiative donne désormais la possibilité aux investisseurs américains de demander aux autorités chinoises de leur concéder des « licences RQFII », qui vont leur permettre de lever et d’utiliser du CNH (« Renminbi offshore ») afin d’acheter directement des actifs de Chine continentale (des actions A, des produits obligataires chinois).
Ce changement ne signifie pas pour autant qu’un montant équivalent de flux d’investissements provenant des États-Unis va s’investir immédiatement sur le territoire chinois. Il faut au préalable que les maisons de gestion américaines signalent leur intérêt pour la « licence RQFII » et qu’elles soumettent un dossier pour qualification auprès de la Commission chinoise de réglementation des valeurs mobilières (CSRC). A titre indicatif, la France bénéficie d’un quota RQFII global de 80 milliards de Renminbi mais les maisons de gestion basées sur son territoire n’en ont mobilisé qu’un tiers environ, à 20,6 milliards. A Hong Kong, en revanche, c’est l’inverse : Tout le quota alloué à la Région administrative spéciale de Hong Kong (HKSAR) a été consommé et les acteurs de marchés en présence militent pour que son niveau soit relevé prochainement.
MSCI oblige
Comment expliquer ce geste d’ouverture plus que symbolique de la Chine aux investisseurs américains, à l’heure de très vives tensions commerciales et politiques (contentieux territoriaux en mer de Chine méridionale) entre les deux premières puissances mondiales ? Sans doute, cette initiative fait-elle partie des efforts que la Chine est prête à réaliser afin de voir ses actions A (cotées à Shanghai et à Shenzhen) intégrées à l’indice de référence très prisé, le MSCI Emerging Markets (du fournisseur d’indices de marchés, MSCI). (http://www.lazuli-international.com/le-memo-du-17052016/) Justement, l’une des conditions pour y arriver est de faciliter l’accès international aux bourses d’actions chinoises. Et effectivement, la récente avancée au niveau des quotas RQFII a toute les chances de jouer positivement en faveur de l’aval de MSCI, qui rendra son avis définitif sur la question dans quelques jours (le 14 juin). Une autre concession notable susceptible de convaincre MSCI s’adresse, quant à elle, aux investisseurs échaudés par les méthodes d’intervention directe des autorités chinoises en période de krach boursier. En juillet 2015, ces dernières avaient mené à la suspension de cotation de plus de 50 % des actions domestiques. Les cours de Bourse de 300 d’entre elles étaient encore suspendus en avril dernier.
Encadrement des suspensions de cotation
Afin d’éviter la répétition d’un tel incident et de régler ce phénomène décrié par les gérants d’actifs, il a été décidé, fin mai, que seules les entreprises (cotées à Shanghai et à Shenzhen) procédant à d’importantes réorganisations de leurs actifs pourraient suspendre leurs cours de Bourse et que cette halte ne pourrait pas durer plus de trois mois. Force est de constater que le poids des arguments pesant contre une intégration des actions A aux MSCI Emerging Markets diminue au fur et à mesure. Si rien n’est encore acquis pour l’instant, il n’en demeure pas moins que la probabilité d’un acquiescement de la part de MSCI progresse.
En cas d’acceptation, nombre de banques d’investissement s’attendent à ce que 5 % de la capitalisation boursière des actions A soient représentées dans le MSCI Emerging Markets. Ce mouvement correspondrait à un flux d’investissement supplémentaire de 7,8 milliards de dollars sur les marchés d’actions de Chine continentale. Ce premier pas permettrait d’estomper l’écart notable entre la représentation de l’Empire du Milieu dans les indices de marchés (dits de référence) et son activité économique. Au demeurant, la Chine est déjà le deuxième marché mondial d’actions, à la fois en termes de capitalisation et de volume de transactions.
« Quota attribué » et « Quota consommé » : En milliards de Renminbi