G20 2016 de Hangzhou, la Chine s’affirme
A contre courant des observateurs de l’Occident, qui ont pris l’habitude de considérer les promesses des G20 d’un œil désabusé, la Chine n’a pas ménagé ses efforts pour jouer un rôle moteur dans la revitalisation du sommet, dont l’objectif originel était de donner une impulsion à la concertation internationale. Parer la ville de Hangzhou de ses plus beaux atours, comme cela a été réalisé à grand renfort de communication, ne sert pas seulement à démontrer que la capitale du Zhejiang est une belle cité à visiter. Cette manifestation de grandeur, relayée médiatiquement au monde entier, signifie que l’Empire du Milieu estime que la gouvernance mondiale ne se décide plus seulement à « l’Ouest » et que la contribution chinoise doit être admise. (Lire l’avis de Jean-Pierre Lehmann, professeur honoraire à l’IMD (International Institute for Management Development), fondateur du Groupe d’Evian) D’aucuns relèveront le plus grand nombre d’économies en développement invitées à participer à la rencontre, un signal que les solutions pour raviver l’activité mondiale doivent concerner un plus grand nombre d’acteurs. Cette mobilisation fait d’ailleurs écho au thème global choisi pour ce G20 2016, à savoir « Vers une économie mondiale novatrice, revigorée, interconnectée et ouverte » (« Toward an Innovative, Invigorated, Interconnected and Inclusive World Economy »).
Ce sujet de travail n’est pas sans rappeler l’initiative OBOR (« One Belt, One Road » / « Une Ceinture, Une Route »), promue par le président de la République Populaire de Chine, Xi Jinping. (http://www.lazuli-international.com/la-route-de-la-soie-du-21ieme-siecle-sur-les-rails) Ce projet de longue haleine ne peut se concrétiser sans la modernisation et la construction de nouvelles infrastructures. A ce titre, la Chine ne s’est pas privée de rappeler au cours du sommet (qui s’est achevé le 5 septembre) que les investissements en la matière étaient « cruciaux » pour la croissance mondiale, avec, comme outil efficace de promotion, les Partenariats Publics Privés (PPP). L’empire du Milieu, qui en a identifiés pour un montant de 11 000 milliards de Renminbi (1 700 milliards de dollars) sur son territoire, prévoit dorénavant d’intensifier leur exécution en travaillant sur leur protection juridique ou leur rendement financier.
L’heure d’afficher des promesses
Ratifiant l’accord de Paris sur le climat (*) le 3 septembre, juste avant le démarrage de la rencontre officielle « des vingt », la Chine s’est faite aussi l’apôtre de la « finance verte », destinée à financer des projets jugés moins néfastes pour l’environnement (Voir graphique ). Le fait que ces mécanismes de financement aient été introduits parmi les sujets de discussions d’un G20 est d’ailleurs une première. Et il a été promis qu’une première édition d’un rapport sur la « finance verte » serait publiée. A titre indicatif, au premier semestre 2016, ce sont 34,6 milliards de dollars d’obligations « vertes » qui ont été émises à l’échelle mondiale, dont 8 milliards par la Chine (plus de 23 % du total).
Surtout, cette rencontre des économies développées et en développement a été l’occasion de discuter de la résurgence du protectionnisme et de ses conséquences. Constatant la décélération marquée des échanges mondiaux de biens et de services (en croissance de 3,1 % par an pour la période allant de 2009 à 2015, à comparer à 6,4 % entre 1998 et 2008), les puissances participantes ont finalement décidé d’adopter des principes directeurs de politique d’investissement au niveau mondial : « G20 Guiding Principles for Global Investment Policymaking ». Leur but est de favoriser un environnement de politique mondial « ouvert, transparent, et par conséquent propice à l’investissement ». A condition, bien sûr, que ces principes, prometteurs sur le papier, soient réellement appliqués. De façon plus concrète, il a été reconnu que le phénomène des surcapacités, à l’origine de vives tensions commerciales entre les pays, était une question à traiter collectivement. Afin d’approfondir les discussions à ce sujet, le G20 a proposé d’organiser un forum international dédié uniquement à cette question. La Chine, pour sa part, s’est engagée à couper ses capacités de production d’acier de 13 % (soit de 150 millions de tonnes) d’ici à 2020.
Le Renminbi, bientôt au « club des quatre »
Autre promesse, le pays a indiqué qu’il ferait des efforts pour communiquer de façon plus transparente sur la conduite de ses politiques économiques et financières, tout en poursuivant ses réformes d’ouverture. A l’heure actuelle, la Chine est d’ailleurs sur le pied de guerre, en train de préparer activement l’intégration du Renminbi au panier constitutif des droits de tirages spéciaux (DTS / « Special Drawing Rights » : SDR) du Fonds monétaire international (FMI). Le premier octobre, le Renminbi deviendra la cinquième devise à le rejoindre. Jusqu’à présent, celui-ci était constitué de dollars US, d’euros, de yens et de livres sterling. (http://www.lazuli-international.com/la-devise-chinoise-reconnue-comme-monnaie-de-reserve-internationale/). Le poids de la devise chinoise y sera de 10,92 %, en troisième position derrière le dollar et l’euro, mais dépassera celui du yen et de la livre sterling.
Dans ce contexte, la Banque mondiale a déjà émis (au mois d’août) des obligations en DTS sur le marché interbancaire chinois. Cette émission réussie a représenté un montant de 700 millions de dollars environ. « Ce n’est qu’un petit goût de ce qui va venir. Selon la China’s Construction Bank, ce marché pourrait facilement atteindre 10 fois ce montant, » commente Mark Tinker, responsable de AXA IM Framlington Equities Asia. S’il est toujours bien difficile d’anticiper les conséquences financières des reconfigurations structurelles des marchés, ce qui est certain, en revanche, c’est que les grandes réunions de concertation sur l’économie mondiale (et sa gouvernance) ne pourront plus faire l’impasse sur la présence des pays en développement.
* L’accord de Paris sur le climat a été adopté le 12 décembre 2015 à l’issue de la COP21, la 21e conférence des parties à la Convention-cadre de l’Onu sur les changements climatiques.
Les pays en développement, première source de projets « verts »
Pour en savoir plus sur le G20 2016 de Hangzhou
• L’avis de Jean-Pierre Lehmann, professeur honoraire à l’IMD, fondateur du Groupe d’Evian
• Le communiqué final du G20 2016
http://www.g20.org/English/Dynamic/201609/t20160906_3396.html