L’assurance en Chine, un tout jeune secteur qui attire les convoitises
« Il est moins risqué de nouer un partenariat avec une SOE, qui sera, en règle générale, toujours soutenue par l’État, surtout si elle appartient au secteur financier. »
Albert Louie donne quelques conseils aux entreprises étrangères souhaitant pénétrer le marché de l’assurance en Chine, qui vient de connaître une expansion fulgurante.
En 2016, les primes d’assurance ont atteint 3 100 milliards de yuan (452 milliards de dollars), un bond de 27,5 % par rapport à 2015.
Comment expliquez-vous la forte expansion des ventes d’assurances en Chine ?
Deux facteurs clés l’expliquent. D’abord, malgré la décélération récente de la croissance économique, les ménages bénéficient d’un plus grand pouvoir d’achat, qui leur permet de dépenser pour leur sécurité. D’une façon générale, la classe moyenne a plus de moyens pour envisager des dépenses destinées à des prestations de service. En 2016, le revenu disponible par personne a augmenté de 8,4 % (ou de 6,3 %, après déduction des facteurs prix). Les dépenses de consommation par habitant, quant à elles, ont progressé de 8,9 % (ou de 6,8 %, déduction faite du facteur prix). Deuxièmement, la population est plus inquiète concernant son avenir, véritablement soucieuse des effets dévastateurs de la pollution, des risques d’empoisonnement alimentaire, etc. Elle se préoccupe de sa santé. Pour résumer, les ménages chinois sont plus riches mais plus angoissés.
Le secteur de l’assurance chinois est-il plus régulé qu’auparavant ?
En Chine, l’assurance est un secteur oligarchique, majoritairement contrôlé par l’État, supervisé par la China Insurance Regulatory Commission (CIRC). Conçue par des experts de haut niveau, la réglementation est approuvée par le National People’s Congress. Cependant, l’application de ses propres directives en la matière – aussi pertinentes soient-elles – souffre d’un manque d’efficacité en raison de l’habitude de contourner les règles établies. Même si elle s’est atténuée, la corruption demeure présente à bien des égards. C’est pourquoi les efforts des autorités chinoises afin d’améliorer la transparence vont se poursuivre et s’accompagneront d’un resserrement réglementaire afin d’assainir les excès tout en contenant les risques financiers. Sur le terrain, certains assureurs fragiles dans le collimateur vont souffrir. Tandis que d’autres, qui disposent de fondamentaux sains, vont survivre et tirer le mieux leur épingle du jeu.
Quels partenaires les assureurs étrangers intéressés par le marché chinois doivent-ils choisir ?
Il est moins risqué d’avoir un partenariat avec une SOE (state-owned enterprise, société détenue par l’État), qui sera, en règle générale, toujours soutenue par l’État, surtout si elle appartient au secteur financier. Ce type de partenariat prendra un certain temps à se construire. D’abord, il faudra apprendre à connaître les personnalités de l’administration, les divers rouages des prises de décision, établir une relation de confiance. Loin d’être vaine, cette implication de longue haleine portera ses fruits à long terme. Le choix d’un partenaire privé, plus facile d’accès à première vue, plus flexible, plus réactif, peut s’avérer plus rentable à court terme mais il peut y avoir un danger. Ce n’est pas parce qu’elles sont portées un jour aux nues que les équipes dirigeantes des groupes chinois privés ne peuvent pas tomber de leur piédestal. De tels retournements de situation peuvent se produire rapidement lorsque les autorités chinoises suspectent les acteurs du privé d’être corrompus. Dans ce cas, la problématique à gérer par le partenaire étranger devient très complexe. A qui doit-il s’adresser, ses accords d’affaires sont-ils encore valables ? Le partenariat juteux des premiers jours peut soudain s’amoindrir considérablement. En ce sens, développer une relation commerciale avec une SOE est une décision plus prudente. En outre, leur façon de diriger leurs équipes s’est nettement améliorée au cours des dernières années. Elles ont, à leurs têtes, de plus en plus de dirigeants multiculturels qui ont fait des études à l’étranger, aux États-Unis, en Europe, etc.
Quelles sont les expertises recherchées ?
Le métier de l’assurance est encore tout jeune en Chine, un tout jeune trentenaire… Les besoins de compétences sont donc importants dans de multiples domaines, dans l’organisation et la gestion de l’entreprise, la vente, les techniques financières, la gestion des actifs. Tout les talents qui disposent déjà d’une expérience dans l’assurance sont très recherchés, au nombre desquels les Chinois dotés d’une compétence acquise dans le secteur à l’étranger.
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