A Hong Kong, la reconnaissance mutuelle des fonds avec la Chine rebat les cartes
La reconnaissance mutuelle des fonds (« The Mainland-Hong Kong Mutual Recognition of Funds », MRF) démarre le premier juillet. Les sociétés de gestion peuvent désormais vendre leurs fonds domiciliés à Hong Kong en Chine et vice et versa.
Avancée majeure de l’ouverture du compte de capital chinois, cette réforme financière complémentaire du développement des connexions mutuelles de marché entre Hong Kong et la Chine continentale (avec le Shanghai-Hong Kong Stock Connect et bientôt le Shenzhen-Hong Kong Stock Connect), est surtout un moteur supplémentaire de l’internationalisation du Renminbi.
Se faisant, elle confirme aussi le statut de Hong Kong, premier centre mondial de Renminbi « offshore, » de gardien et de régulateur des flux de capitaux entrants ou sortants de la Chine continentale.
Mobilisation des sociétés de gestion internationales
« En permettant aux sociétés de gestion de gérer les capitaux des fortunes basées sur le Continent et vice et versa, la MRF bouleverse la donne de l’industrie de l’investissement, » observe Invesco.
« Environ 100 fonds de Hong Kong et 850 de Chine Continentale seraient éligibles à ce programme, » indique Helen Fok, « counsel » de Clifford Chance basée à Pékin, en citant les données dévoilées par la China Securities Regulatory Commission (CSRC).
Toutes les sociétés de gestion ne seront cependant pas prêtes à se lancer dans l’aventure dès juillet. D’abord, l’annonce du lancement de ce projet ambitieux est intervenue dès le 22 mai, plus tôt que ne l’attendaient nombre d’observateurs absorbés par la mise en musique du Shanghai-Hong Kong Stock Connect. Ensuite, finaliser sa stratégie de différentiation, installer ses canaux de distribution, définir le marketing approprié à la MRF sont des travaux hautement stratégiques qui requièrent un peu de temps.
A Hong Kong, une quinzaine de sociétés de gestion seulement seraient opérationnelles pour distribuer leurs fonds en Chine continentale dès cet été. Dans tous les cas, « la MRF va attirer plus de sociétés de gestion à Hong Kong, » assure Helen Fok.
Appétit plus grand des investisseurs de Hong Kong
Au démarrage, c’est la demande des investisseurs de Hong Kong pour les fonds de Chine continentale qui sera la plus importante. « Les acteurs de Hong Kong disposent de plus de connaissances, de plus de compréhension, d’expériences en investissements en produits composés d’actions A (cotées en Chine continentale, à Shanghai ou à Shenzhen). Les Hongkongais sont prêts à investir immédiatement en produits chinois, mais il faudra compter sur un certain délai avant que les investisseurs de Chine continentale ne comprennent les mécanismes des fonds investis dans d’autres marchés que les leurs, » analyse Invesco.
Partant de ce constat, Terry Pan, directeur général chez Invesco Asset Management Asia Ltd pour « Greater China », Singapour et la Corée du Sud explique que « Invesco Hong Kong, l’un des investisseurs pionniers en actions A, a travaillé étroitement avec Invesco Great Wall (coentreprise basée à Shenzhen) afin de construire une plate forme d’investissement et de distribution avec la mission de déployer l’offre chinoise à Hong Kong. » Il précise qu’environ « 52 % des fonds d’Invesco Great Wall seront éligibles à la MRF d’ici à la fin de l’année. »
Démarrage en douceur
Comme la plupart des sociétés de gestion, Invesco ne s’attend pas à un accroissement spectaculaire de liquidités dans les fonds participant au démarrage de la MRF, « en raison des quotas imposés, de la taille de l’univers des actions éligibles, etc. »
La participation au programme est sujette à un quota de 300 milliards de yuan de flux entrants et sortants dans les fonds éligibles, ainsi qu’à plusieurs autres critères imposés par les autorités de marchés respectives. Il s’agit de la CSRC pour les fonds de Hong Kong ciblant le Continent, ou, de la Securities and Futures Commission (SFC) pour les fonds de Chine continentale souhaitant se positionner à Hong Kong.
Suivant les règles édictées, ces derniers doivent exister depuis un an, être d’une taille d’au moins 200 millions de Renminbi. Ces acteurs ne pourront pas non plus investir principalement sur les marchés de capitaux de Hong Kong. Qui plus est, la valeur des parts cédées aux investisseurs de Hong Kong ne pourra pas dépasser plus de 50 % de la valeur de la totalité des actifs logés dans leurs fonds.
Convergence réglementaire
A court terme, plusieurs autres défis que la motivation de participer à la MRF doivent être relevés, dont « l’efficacité opérationnelle des règlements et des transactions, » relève Invesco. Un autre pari est de permettre aux investisseurs de Hong Kong et de Chine de mieux se comprendre, de mieux connaître les divers produits éligibles à la MRF, afin de pouvoir les comparer aux fonds disponibles sur leurs propres marchés.
Savoir s’adapter à une réglementation en constante évolution est un enjeu tout aussi fondamental. Car, à long terme, selon Helen Fok, la MRF devrait « conduire à une convergence du paysage réglementaire entre Hong Kong et la Chine continentale.»