Chine, un National People’s Congress (NPC) stratégique avant les échéances politiques de l’automne

Coup d’envoi. Les « deux conférences » annuelles, chargées d’affiner les orientations économiques futures de la Chine, sont ouvertes. Leurs conclusions, prévues pour le 15 mars, sont d’autant plus cruciales cette année qu’elles préparent le terrain à l’un des rendez-vous décisifs de la gouvernance du Parti communiste chinois. Il s’agit du 19e Congrès national du Parti communiste chinois dont la tenue, sans doute en novembre 2017 (à Pékin, comme tous les cinq ans), devrait déboucher sur un renouvellement des instances dirigeantes (https://www.lazuli-international.com/le-memo-du-24102016/). En attendant, la session annuelle du CPPCC (Chinese People’s Political Consultative Conference, Conférence consultative politique du peuple chinois) a démarré dès vendredi (3 mars) et celle du National People’s Congress (NPC, Assemblée nationale populaire) a commencé dimanche (5 mars).

6,5 % de croissance du PIB en 2017

A cette occasion, le Premier ministre, Li Keqiang, a dévoilé l’objectif de croissance de PIB du gouvernement pour 2017, de 6,5 % environ. Il estime que « cette cible réaliste permet de maintenir la confiance des acteurs économiques, tout en menant à bien les ajustements structurels nécessaires et en construisant une société modérément prospère sous tous ses aspects d’ici 2020 ». Selon le rapport de la Commission Nationale pour le Développement et la Réforme (NDRC), une progression du PIB aux alentours de 6,5 % lors des quatre années à venir est suffisante pour atteindre l’objectif fixé dans le cadre du treizième plan quinquennal (2016-2020), de doubler le PIB de 2010 de la Chine d’ici à 2020. Jugé suffisant, le taux de croissance de l’activité de 6,5 % est cependant qualifié de « nécessaire pour atteindre l’objectif emploi du pays, » relève la NDRC.

Objectif emploi relevé

Pour 2017, le nombre de créations d’emplois souhaitées est de 11 millions dans les zones urbaines, c’est-à-dire un million de plus que celui projeté pour 2016. Les autorités chinoises espèrent que le taux de chômage urbain demeurera autour des 4,5 % (4,02 % fin 2016). La NDRC remarque que « les pressions sur le marché du travail s’accentuent. Quelque 15 millions de nouveaux travailleurs vont entrer sur le marché de l’emploi en 2017, avec un plus grand nombre de salariés licenciés à réemployer en raison de la reconfiguration des entreprises confrontées à des problèmes de surcapacités. » Les emplois devraient provenir de plusieurs sources, des postes vacants liés aux départs à la retraite et, essentiellement, de l’expansion du secteur des services (l’industrie tertiaire représente désormais 51,6 % du PIB de la Chine). Ce mouvement, qui s’est considérablement renforcé depuis 2014, continue de se caractériser par la montée en puissance de l’entrepreneuriat et de l’innovation. Les autorités chinoises notent, qu’en 2016, les revenus des entreprises dotées d’un chiffre d’affaires supérieur à 20 millions de yuan, faisant partie des 27 industries naissantes qualifiées de stratégiques, ont progressé de 11,32 % (et leurs bénéfices de 13,96 %). Les ventes via la distribution en ligne, quant à elle, ont atteint près de 5 200 milliards de yuan en 2016, un bond de 26,2 % d’une année sur l’autre. Les ventes de biens par voie numérique ont représenté 12,6 % des ventes totales de biens de consommation sur le territoire chinois.

L’inflation prend ses quartiers

L’autre objectif fixé par les autorités chinoises scruté par les économistes est celui de l’évolution des prix. Nombre de spécialistes de marchés savent que la corrélation entre l’inflation du PPI (« Producer Prices index », indice des prix à la production) de la Chine – revenu en territoire positif depuis septembre 2016 – et la croissance nominale de son PIB est forte, de même que la corrélation entre le PPI et les profits industriels. (https://www.lazuli-international.com/les-actions-chinoises-recommencent-a-plaire/) A cet égard, le scénario publié par la NDRC est de bon augure. Selon elle, la pression déflationniste des prix à la production manufacturière s’atténue. La ré-appréciation des prix observée devrait se transmettre, de façon mécanique, aux industries en aval comme aux biens de consommation finaux. La remontée des prix des matières premières et des biens internationaux importés sont deux autres éléments qui joueront dans l’augmentation des prix escomptée pour 2017. En définitive, le gouvernement chinois table sur un CPI (Consumer Price Index », indice des prix à la consommation) en hausse de 3 % en 2017 (à comparer à 2 % en 2016).

Le leitmotiv des coupures de capacités

Pour autant, cette toute nouvelle dynamique de prix ne pourra se prolonger sans la poursuite de la transformation des industries manufacturières en surcapacités. La NDRC en convient et précise que, cette année, les capacités de production du pays devront être coupées de 50 millions de tonnes métriques dans l’acier, et de plus de 150 millions de tonnes métriques dans le charbon. La Commission ajoute qu’en « même temps, il faudra fermer, arrêter et suspendre la construction des usines fonctionnant au charbon avec une capacité de plus de 50 millions de kilowatts. » Il s’agit de faire d’une pierre deux coups : Provoquer une amélioration de la rentabilité industrielle tout en limitant les effets néfastes du développement de l’activité du pays sur l’environnement. A ce propos, Li Keqiang promettait en mars 2016 : « D’ici à cinq ans, la consommation d’eau, d’énergie, les émissions de dioxyde de carbone par unité de PIB devront être réduites de respectivement 23 %, 15 % et de 18 %. » Ou se situe-t-on aujourd’hui ? « En 2016, la consommation d’eau, d’énergie et les émissions de dioxyde de carbone par unité de PIB ont diminué chacune de 5,6 %, de 5 % et de 6,6 %, » répond la NDRC.

La main verte

Malgré des progrès évidents, le chemin à parcourir afin de tenir toutes les promesses « vertes » du treizième plan quinquennal est encore long. Pour gagner ce pari, l’un des axes qui sera approfondi cette année est le déploiement de projets de modernisation agricole liés à la conservation des eaux : 172 devraient être développés, tandis que 15 autres feront l’objet de travaux en vue d’un démarrage. Souvent oubliée de la transformation de l’Empire au Milieu menée tambour battant au cours de la dernière décennie, l’agriculture revient peu à peu sur le devant de la scène. Les experts financiers en quête d’investissements inédits auraient tort de faire l’impasse sur le secteur primaire chinois, en train d’être fortement incité à se moderniser.


Six objectifs majeurs pour 2017

• Une croissance du PIB aux alentours de 6,5 %

• Une hausse du CPI autour de 3 %

• Plus de 11 millions de créations d’emplois en zone urbaine, avec un taux de chômage autour de 4,5 %

• Une progression solide des volumes d’import et d’export, un équilibre des paiements internationaux

• Une augmentation du revenu par habitant en cohérence avec la croissance économique

• Une réduction d’au moins 3,4 % de la consommation d’énergie par unité de PIB, accompagnée par la poursuite de la sortie des polluants majeurs

Source : Rapport du Premier ministre chinois, Li Keqiang sur le travail du gouvernement, publié le 5 mars 2017