Chine, un treizième plan quinquennal placé sous le signe du rééquilibrage
Meilleure répartition des ressources sociales et territoriales, innovation, libéralisation et ouverture au monde, telles sont les clés du treizième plan quinquennal (2016-2020) chinois, dont les grandes orientations viennent d’être dessinées, mais dont le détail ne sera connu qu’à la mi novembre. Celles-ci devraient permettre d’accompagner la transformation de l’Empire du Milieu tout en gommant les déséquilibres les plus flagrants, et non de forcer une rupture. Cette ambition raisonnée n’interdit pas des annonces marquantes, telle celle, hier, au sortir du cinquième Plénum du dix-huitième Congrès du Parti Communiste Chinois (PCC) de l’abandon de la politique de l’enfant unique (introduite en 1978).
Tous les couples, qu’ils soient enfants uniques ou non, pourront désormais avoir deux enfants. 90 millions de couples chinois environ – dont 60 % d’entre eux auraient 35 ans ou plus – pourront ainsi élargir leur famille. Les habitants des zones rurales, souvent plus enclins que ceux des grandes villes à construire de grandes familles, devraient être les plus nombreux à apprécier cette initiative.
Éviter une pénurie de main d’œuvre
Espérée depuis longtemps, cette mesure est destinée à corriger le vieillissement accéléré de la population, susceptible de provoquer une pénurie brutale de main d’œuvre : La population active décline rapidement depuis 2011, en même temps que sa part dans la population totale chinoise. En 2014, les personnes âgées de 16 à 59 ans (916 millions) représentaient 66 % de la population totale chinoise, à comparer à 74,5 % en 2010. (Voir le graphique ci dessous)
La décision du PCC constitue un progrès notable mais ses effets pourraient être limités, si elle n’est pas entourée de mesures sociales complémentaires. Elles pourraient inclure l’amélioration des soins de maternité, l’accès facilité aux services infirmiers pour les enfants en bas âge et à l’école, ainsi qu’une diminution des coûts de l’ensemble de ces services.
Deuxième annonce significative en matière sociale, le droit à l’assurance-vieillesse sera élargi à l’ensemble de la population chinoise. L’élargissement de l’assurance existante, financée par les fonds d’État, devrait concerner près de 200 millions de Chinois. Un système d’assurance pour les maladies graves diffusé à plus grande échelle sera également mis en place. Fin septembre 2014, « seulement » 650 millions des 1,3 milliard de Chinois étaient couverts par une telle assurance.
Une croissance économique « entre moyenne et élevée »
A propos des perspectives de croissance de PIB, le PCC n’est pas rentré dans le jeu de ceux qui espéraient la publication de chiffres précis. A ce jour, les économistes doivent donc se contenter d’une équation à résoudre. Et, il y a d’ailleurs fort à parier que les calculatrices des statisticiens doivent s’échauffer à l’heure qu’il est… (Voir le graphique ci dessous)
Selon le communiqué du PCC, la Chine vise « une croissance économique entre moyenne et élevée.» « L’objectif sera de doubler le PIB de 2010 et les revenus par tête pour les habitants des espaces urbains et ruraux d’ici 2020, en assurant un développement plus équilibré, inclusif et durable. »
Tout en promouvant un « meilleur développement dans le secteur industriel, » l’Empire du Milieu « augmentera considérablement la contribution de la consommation à la croissance économique. Le taux d’urbanisation, calculé sur la base du nombre de résidents enregistrés, sera également augmenté à un rythme plus rapide. »
Innovation toute
L’un des moteurs stratégiques de l’expansion ainsi décrite, placée sous le signe d’un rééquilibrage tant sectoriel que territorial, est l’innovation.
Le PCC insiste : « Les secteurs tels que les sciences, la technologie et la culture doivent être plus innovateurs. » Le plan « Internet Plus » devra rendre les secteurs jugés « dépassés plus efficaces en les persuadant de recourir plus au réseau. » Quant au développement de l’économie de partage et du secteur du « Big Data », il sera fondamental. Les autorités encourageront en outre « l’entrepreneuriat de masse dans l’espoir qu’il conduise à l’émergence de nouvelles technologies. »
Le système d’avenir doit cultiver l’innovation ainsi qu’une « meilleure répartition des ressources, telles que la main-d’œuvre, le capital, la terre, la technologie et la gestion. » L’innovation sera mise au service d’un meilleur maillage régional. Ce travail d’intégration consiste à « former des ceintures économiques le long des grands fleuves, des routes et des chemins de fer, sur les régions côtières, avec une attention toute particulière à plusieurs zones économiques clés » précise le PCC.
De plus, les régions côtières seront incitées à s’engager davantage dans le commerce international. Sans oublier la construction de sites de production de haute technologie et de zones transfrontalières de coopérations économiques.
Libéralisation et ouverture
Partie prenante de la modernisation envisagée, la libéralisation de certaines pratiques financières se retrouve à l’ordre du jour.
A l’avenir, le gouvernement chinois devrait moins intervenir dans la formation des prix : Selon le PCC, les tarifications des produits et des services des secteurs concurrentiels (financement, éducation, culture, traitement médical) seront déréglementées. Les autorités centrales envisagent par ailleurs de réduire nombre de formalités bureaucratiques tout en déléguant plus de pouvoirs aux autorités locales. Il s’agit, in fine, de remanier la gestion des actifs publics, « d’établir des systèmes modernes fiscaux et de taxes, tout en réformant l’encadrement financier. »
Les ambitions chinoises ne s’arrêtent pas à son propre territoire. La Chine « développera une économie plus ouverte à un niveau plus élevé. Elle participera davantage à la gouvernance et au commerce au niveau mondial, afin d’établir une communauté d’intérêts communs, d’une envergure plus large, » indique le PCC. Des efforts de transparence devraient être entrepris afin d’attirer plus d’investisseurs étrangers, tout en assurant mieux la protection de leurs droits. Une « liste négative » indiquant clairement les secteurs et entreprises inaccessibles à l’investissement étranger devrait être adoptée.
Autre nouveauté, le PCC a souligné la nécessité de renforcer la coopération avec Hong Kong et Macao, ainsi que leurs rôles dans « le développement économique du pays et de son ouverture au reste du monde, » notamment dans l’initiative « On Belt, One Road » (« Une Ceinture, Une Route ») et de l’internationalisation du Renminbi. Le « Port au parfum » a eu raison de se mobiliser très tôt afin d’épauler ces projets.
Doubler le PIB de 2010 d’ici 2020
Chute du nombre de naissances
(Repris par www.lepetitjournal.com/hong-kong ; Le Petit Journal de Hong Kong )