En direct de l’Asian Financial Forum : La Chine adapte ses pas à sa prise de stature
Orienter, « diriger, la croissance tout en étant à l’avant garde de l’innovation. L’Asie et au delà » (« Steering growth and pioneering innovation : Asia and beyond »), tel est l’intitulé de la onzième édition de l’Asian Financial Forum (AFF) de Hong Kong. Cette année, l’événement organisé par le Hong Kong Trade Development Council (HKTDC) qui se tient les 15 et 16 janvier traite de deux sujets qui sont antinomiques à première vue. Tandis que guider la croissance économique intègre une notion de sagesse, de « dosage », voire d’équilibre, être pionnier en matière technologique implique, au contraire, une forte prise de risque sans compter les deniers investis. Cette donne paradoxale correspond pourtant bien au défi que la Chine doit relever aujourd’hui. Comme le résume Takehiko Nakao, président de l’Asian Development Bank, « la Chine a de belles perspectives, en particulier grâce à ses choix de développement technologique pertinents. Toutefois, elle doit évacuer certains risques posés qui pourraient s’avérer systémiques, » contagieux pour d’autres économies asiatiques mais aussi du monde.
Ordonner le désendettement
Faisant allusion à la problématique du stock de dette massif que la Chine doit traiter, Takehiko Nakao choisit cependant d’adopter un discours tranquillisant : « Les autorités chinoises sont conscientes de cette situation. Elles sont prêtes à en gérer les risques. » Cette volonté de désendettement domestique et de régulation plus efficace commence à se traduire dans les faits, avec, par exemple, l’installation du nouveau régulateur financier (https://www.lazuli-international.com/le-memo-du-10112017/), le Comité pour le développement et la stabilité financière (« Financial Stability and Development Committee »). Placé au sein du Conseil d’État, celui-ci centralise à la fois la réglementation financière et la politique monétaire chinoise. « Nous devons apporter de la stabilité aux marchés financiers. Sans stabilité, notre économie ne peut croître de manière durable ni raisonnable, » insiste Jiang Yang, vice-président de la China Securities Regulatory Commission (Photo ci-dessus), s’exprimant à l’AFF. Simultanément, « nous devons introduire plus d’innovation dans nos marchés financiers. A cet égard, nous devons continuer de travailler étroitement avec Hong Kong, » promet-il.
L’AIIB fête deux ans d’ouverture
Une autre question posée de manière récurrente lors des débats de cette première journée de l’AFF est celle de la conséquence de l’influence grandissante de l’Empire du Milieu dans l’économie mondiale ainsi que sur la « Route de la soie du 21ième siècle » (OBOR ; « One Belt, One Road »). Sa prise de poids – le PIB chinois devrait dépasser celui des États-Unis en 2019 – chamboule l’ordre établi. « Le rôle de la Chine n’est pas d’être le numéro un (« leader ») dans tous les domaines. Ce qui prime pour le pays, c’est la prospérité de son peuple, de le nourrir, » déclare Jin Liqun, président de l’Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB) (Photo ci-dessus). Il profite d’ailleurs du forum de Hong Kong pour préciser aussi le rôle de la jeune institution bancaire – deux ans d’existence le 16 janvier – qu’il dirige. L’AIIB « n’est pas une banque chinoise mais internationale : 84 pays en sont membres ! Nous continuons de recruter des talents et nous les recrutons sans porter attention à la nationalité de leur passeport. Ce qui compte, c’est leur compétence, » assure Jin Liqun. De même, le président de l’AIIB précise que les projets financés par la banque doivent répondre à trois critères, être financièrement viables – « Nous ne sommes pas une association caritative » – , positifs pour l’environnement et acceptés par la population locale concernée par les infrastructures à l’étude. Autrement dit, l’AIIB n’existe pas pour dépenser à tout crin. Elle étudie « toute une combinaison de facteurs, avant de s’engager. » De l’ambition certes, mais avec professionnalisme. A cette édition de l’AFF, pourtant très portée sur le changement de stature de la Chine, la démesure n’est pas de bon ton.