Rencontre avec Eric Berti, Consul général de France à Hong Kong et Macao
Installé à Hong Kong depuis septembre 2015, Eric Berti témoigne du dynamisme français en matière d’innovation au Port au parfum.
Il explique aussi comment la France pourrait se positionner sur la Route maritime de la soie du 21ième siècle. En créant, par exemple, une section du cluster maritime français à Hong Kong.
Comment fonctionne la « Team France » ?
J’attache une importance particulière à ce que tous les services français, publics ou privés, qui travaillent à Hong Kong au renforcement de la présence économique de la France, travaillent ensemble. C’est le concept de « Team France » (« Équipe France »), qui se met en place progressivement. Son objectif est de faciliter les échanges d’informations et de dégager des synergies entre le Service économique du Consulat général, Business France (établissement public qui aide notamment les PME françaises à s’installer à Hong Kong), la Chambre de Commerce française de Hong Kong, l’une des plus importantes d’Asie, et la section locale des Conseillers du commerce extérieur de la France.
Dans cet esprit, je réunis toutes les six semaines de façon informelle, dans ce que j’appelle un « Comité économique », les responsables de ces services pour coordonner nos actions. Nous échangeons nos calendriers d’événements, nous coordonnons et évaluons nos capacités mutuelles de soutien. « Team France » associe également des services à vocation plus spécifique, tels que Atout France, dédié à la promotion du tourisme en France, mais aussi le service culturel et de coopération du consulat. Son action, notamment à travers le festival du « French May », a bien sûr un impact important sur la présence économique de la France à Hong Kong.
Tous ces acteurs ont vocation à participer, tous les six mois, à un « Conseil économique », organisé par le consulat, comme c’est le cas dans toutes les ambassades et dans quelques grands consulats généraux à l’image de Hong Kong. Ce « Conseil économique » a pour objet de coordonner et d’animer le réseau économique français de la Région Administrative Spéciale (RAS), en lien étroit avec notre ambassade à Pékin.
Il existe parfois des situations de concurrence entre Business France et la Chambre de Commerce, par exemple dans les services proposés aux PME. Un accord conclu en mars 2015 entre la Fédération des CCI Internationales et le siège de Business France prévoyait une répartition des activités entre les deux organismes. A priori, Business France avait plutôt vocation à être sollicitée en amont, lorsqu’une entreprise est en recherche de développement de courant d’affaires ou de partenaires commerciaux à Hong Kong. La Chambre de Commerce, quant à elle, avait vocation à épauler les sociétés en phase d’implantation. Dans les faits, cette répartition est difficile à mettre en place. Quoi qu’il en soit, l’important est que chaque organisme communique sur son action et que les entreprises souhaitant s’installer à Hong Kong bénéficient d’une meilleure lisibilité de l’action de chacun.
Nous n’avons pas renoncé à ce qu’un modus operandi satisfaisant pour tous puisse être formalisé cette année à Hong Kong, avec un accord entre la CCI et Business France, prenant en compte les spécificités locales. Cet accord permettrait de concrétiser la volonté du gouvernement d’observer la création, à Hong Kong et partout dans le monde, d’une offre de service simplifiée, plus cohérente pour les entreprises françaises souhaitant se développer localement ou, à l’inverse, à toute personne envisageant d’investir en France.
Comment promouvez-vous les technologies françaises ?
De plusieurs façons. D’abord avec la « French Tech Hong Kong », dossier porté par Business France et le service économique, qui a été labellisée à Paris le 29 janvier dernier par Emmanuel Macron, le Ministre de l’économie. La création de la « French Tech Hong Kong » a été annoncée ici à l’occasion du « StartMeUp Festival », organisé sous l’égide de InvestHK.
Nous souhaitons soutenir la dynamique des entreprises françaises désireuses de bénéficier de l’environnement hongkongais, propice à la croissance de nombreuses start-ups (dont le nombre a augmenté de près de 50 % entre 2014 et 2015). L’objectif de la « French Tech Hong Kong » (http://hk.lafrenchtech.com/ , https://twitter.com/FrenchTechHK) est de fédérer la communauté française à Hong Kong dans le domaine des technologies en créant des synergies avec l’écosystème français tout en tissant des liens avec Shenzhen, la métropole de technologies du Guangdong voisin.
Cette initiative devrait faciliter le financement des entrepreneurs, leur développement et les aider à répondre à leurs besoins de recrutements.
C’est aussi une façon de faire découvrir l’innovation française aux acteurs locaux et de diversifier l’image de la France, très centrée à Hong Kong sur la gastronomie, le tourisme ou la culture. Les technologies ainsi mises en valeur sont celles des finances (« FinTech ») mais aussi celles liées à l’analyse de données (« Data analytics » ou « big data »), de l’Internet ou de la santé (« HealthTech »).
Un autre domaine où l’innovation française mérite d’être mise en avant est l’environnement. Cette activité est stratégique, avec la nécessité de respecter les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris, lors de la COP21. Deux grands acteurs français de ce secteur sont d’ailleurs très impliqués à Hong Kong : Suez Environnement, qui inaugurera au printemps une unité de méthanisation et de traitement des déchets organiques, et, Veolia, qui ouvrira cette année une usine de traitement des boues des onze stations d’épuration de la région.
Nous ne devons pas oublier non plus la mobilisation de tous les secteurs d’activités français liés au concept de « Smart city » (ville intelligente), afin de dessiner les contours du futur visage de Hong Kong. A terme, celui-ci devrait intégrer, de la façon la plus efficiente possible, la construction, le transport, le traitement de l’eau et des déchets, ainsi qu’une plate-forme « intelligente », c’est-à-dire le stockage associé à l’analyse de toutes les données concernant les dépenses d’énergie, la régulation du trafic, l’environnement, etc.
Comment la France peut-elle, de Hong Kong, participer à La route de la soie du 21ième siècle ?
Je considère avec un grand intérêt l’initiative « One Belt, One Road » (« Une Ceinture, une Route »). Elle comprend deux volets, l’un terrestre et l’autre maritime. Hong Kong, place financière internationalement reconnue, a sans doute vocation à participer aux deux dimensions de cette ambitieuse initiative. Nos entreprises, très présentes à Hong Kong, peuvent aider la RAS à trouver toute sa place dans ce concept porteur d’avenir, mais que les autorités ou entreprises hongkongaises ont encore du mal à appréhender.
Je pense, pour ma part, que la France a une carte à jouer à Hong Kong dans cette initiative, particulièrement s’agissant de la Route maritime de la soie. Nous allons donc nous positionner en tentant de créer, à Hong Kong, une section du cluster maritime français, à l’image de celle qui existe déjà à Singapour depuis juin 2014.
Suivant un principe assez similaire à celui de la « French Tech », l’idée est de mettre en réseau les entreprises françaises du secteur maritime déjà basées dans le Delta de la rivière des perles, qu’il s’agisse de compagnies maritimes, de spécialistes du transport et la logistique, des technologies mais aussi des banques françaises actives dans le domaine du financement maritime ou de sociétés de service dans le domaine de la certification ou de l’assurance, du conseil juridique ou de l’arbitrage.
Le cluster maritime aura en outre vocation à créer de nouveaux partenariats avec Hong Kong dans le domaine de la recherche, de la protection de l’environnement ou des échanges culturels.
L’un de mes premiers objectifs est de placer les ports français sur la carte de la Route maritime de la soie, dont Marseille, qui peut jouer un rôle de plate-forme pour la réexportation de produits chinois vers l’Afrique du Nord.
Tout en participant à la Route de la soie, ce cluster maritime pourrait, de surcroît, apporter des solutions créatives au repositionnement et à la revitalisation des activités maritimes hongkongaises, concurrencées fortement par Singapour, Shenzhen ou Shanghai.
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